
Depuis le décès de Félix Houphouët-Boigny en 1993, la Côte d’Ivoire a traversé des étapes difficiles qui ont mis à l’épreuve son unité et sa stabilité. Aujourd’hui, alors que le pays se prépare pour une nouvelle élection présidentielle, il y a lieu de réfléchir aux conséquences d’une prolongation du pouvoir exécutif.
Par Abou Maco
La Côte d’Ivoire, autrefois perçue comme un modèle de stabilité en Afrique de l’Ouest, a vu son parcours marqué par des crises profondes depuis la disparition de son premier président. La nomination d’Alassane Ouattara au poste de Premier ministre en 1990, suivie de la mise en place de la carte de séjour, a introduit des tensions identitaires qui ont exacerbé les divisions internes. Ces décisions ont contribué à une perception croissante de l’étranger comme un « autre », alimentant des sentiments nationalistes et xénophobes.
Les événements de 2002, où une rébellion a éclaté, ont plongé le pays dans une guerre civile, divisant le territoire entre le nord et le sud. Cette crise a été exacerbée par des rivalités politiques, notamment entre Alassane Ouattara et Laurent Gbagbo, et a laissé des cicatrices profondes dans le tissu social ivoirien. La période post-électorale de 2010-2011 a vu des violences qui ont fait plus de 3 mille morts, selon les Nations Unies.
Aujourd’hui, à 83 ans, Alassane Ouattara brigue un quatrième mandat présidentiel, malgré des engagements antérieurs à ne pas se représenter. Cette décision suscite des interrogations sur la constitutionnalité de sa candidature et sur les risques de tensions politiques. Des manifestations ont eu lieu, notamment à Abidjan, où des milliers de personnes ont exprimé leur opposition à ce quatrième mandat, dénonçant une concentration excessive du pouvoir et appelant à des élections libres et transparentes.
Le climat politique actuel est tendu, avec des rapports faisant état de répression des opposants et de restrictions des libertés publiques. Des rassemblements pacifiques ont été dispersés violemment, et des leaders politiques ont été arrêtés ou contraints à l’exil. Cette situation soulève des questions sur l’état de la démocratie en Côte d’Ivoire et sur la volonté réelle d’ouvrir l’espace politique à une nouvelle génération.
Il faudrait pourtant rappeler que la stabilité d’un pays ne réside pas uniquement dans la prolongation du pouvoir d’un individu, mais dans la capacité à renouveler les institutions et à permettre l’émergence de nouvelles voix. La Côte d’Ivoire a besoin d’un leadership qui incarne l’unité nationale, la réconciliation et le respect des principes démocratiques. Il est temps de tourner la page et de permettre à une nouvelle génération de prendre les rênes du pays.
Ce pays a traversé des épreuves difficiles mais elle a également montré une résilience remarquable. Pour préserver la paix et l’unité, il est important que les dirigeants actuels fassent preuve de sagesse et de responsabilité. Un changement de leadership, loin d’être une menace, pourrait être l’opportunité d’un renouveau démocratique et d’une réconciliation nationale durable. Le moment est venu de passer le flambeau à ceux qui porteront l’avenir du pays avec vision et intégrité.
Abdoulaye Sankara