L’ingénieur et consultant en intelligence artificielle, Amon Bazongo, appelle à une refondation de la politique économique autour de la technologie et de l’innovation. Selon cet invité de ce numéro de l’émission « Nous Vaincrons », seul un État stratège et volontariste peut impulser un développement durable à travers la création de champions nationaux, la stimulation de l’écosystème de startups et la numérisation des services publics.
M. Amon Bazongo est, entre autres, président de Tech Emerging Afica, co-organisateur de Deep Learning IndabaX Burkina 2025 et promoteur de la Semaine de l’Intelligence Artificielle et des Technologies Émergentes (SEINAR 3ᵉ édition) prévue du 1ᵉʳ au 5 novembre 2025 à Ouagadougou et en ligne.
L’État, moteur de la révolution industrielle nationale
Selon l’expert Bazongo, le développement technologique ne peut être laissé au hasard. « Il faut une volonté délibérée de l’État pour créer des champions industriels nationaux », soutient-il. Il cite l’exemple de la Chine, qui, sous Deng Xiaoping, a choisi d’accompagner des entreprises comme Huawei pour accélérer sa croissance économique.
De même, Taïwan a bâti son industrie électronique en misant sur ses talents expatriés, soutenue par l’État et des partenaires comme Philips. Cette implication publique, estime Amon Bazongo, rassure les investisseurs et facilite le financement de projets stratégiques.
Trois piliers pour bâtir un écosystème d’innovation
Pour l’émergence d’un véritable écosystème de startups, trois ingrédients sont indispensables, dit-il : le capital-risque, la culture de l’innovation et la compétence. Si le Burkina Faso dispose d’une jeunesse compétente, le pays manque encore de capital-risque et d’une culture favorisant la prise d’initiative.
« Les jeunes se tournent davantage vers la fonction publique que vers la création d’entreprise », regrette-t-il. Il invite à s’inspirer du modèle israélien, où l’État a mis en place un fonds d’investissement public-privé pour soutenir les startups naissantes.
Des Zones Économiques Spéciales pour attirer l’investissement
Amon Bazongo préconise également la création de Zones Économiques Spéciales (ZES) dédiées aux secteurs technologiques. Ces zones, dotées de cadres juridiques et fiscaux plus souples, permettent d’attirer les investisseurs tout en protégeant les secteurs stratégiques.
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« Le Sahel, et particulièrement le Burkina Faso, gagnerait à disposer d’une Zone Économique Spéciale (ZES) dédiée aux technologies de pointe », plaide-t-il, citant des domaines comme la blockchain ou le spatial comme leviers d’innovation.
Numériser l’administration pour ancrer la culture digitale
Pour ancrer durablement la culture numérique, l’expert recommande la digitalisation intégrale des services publics. Une démarche qui, selon lui, crée des opportunités pour les jeunes entreprises locales et favorise la transparence.
Il évoque les exemples du Rwanda, avec sa plateforme Irembo Gov regroupant plus de 100 services en ligne, et de l’Estonie, pionnière mondiale du e-gouvernement. Cette transition numérique doit s’accompagner d’une stratégie nationale de cybersécurité, indispensable à la souveraineté technologique.
Vision et modèles de réussite pour la jeunesse
Enfin, Amon Bazongo plaide pour une vision claire ; par exemple, faire du Burkina Faso un pôle technologique d’ici 2030 ; appuyée par des outils concrets comme des fonds d’investissement ou des subventions à l’innovation.
Il insiste sur la nécessité de valoriser les réussites locales afin d’inspirer la jeunesse : « Nos jeunes ont besoin de modèles burkinabè qui réussissent dans la tech pour oser se lancer ».
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