
Le titre du concert, « La Cameratte », semble être un clin d’œil à « camera », en référence à la « musica da camera ». C’est l’appellation italienne pour la musique de chambre, compte tenu du nombre réduit de musiciens inférieur à celui d’un orchestre symphonique habituel.
La Presse — L’Orchestre symphonique tunisien a signé sa rentrée le 15 octobre avec « La Cameratte », un spectacle dirigé par le maestro Shady Garfi. Contrairement à l’habitude, c’est le Théâtre des Régions qui a accueilli cette fois-ci un public nombreux, mais sans atteindre la capacité maximale.
Le titre du concert, « La Cameratte », semble être un clin d’œil à « camera », en référence à la « musica da camera ». C’est l’appellation italienne pour la musique de chambre, compte tenu du nombre réduit de musiciens inférieur à celui d’un orchestre symphonique habituel.
Le programme s’est voulu éclectique, allant de Mozart aux percussions orientales, avec une volonté affirmée de s’adresser à un large public.
La soirée a débuté avec le « Divertimento en ré majeur de Mozart », interprété par une formation de 16 musiciens, principalement à cordes. Le célèbre « Adagio d’Albinoni » a suivi dans une version réarrangée par Shady Garfi lui-même qui s’est installé au piano pour en jouer l’introduction. Il a ensuite retrouvé sa baguette pour diriger « Oblivion » d’Astor Piazzolla, en confiant le clavier au pianiste Bessem Makni. Ce morceau doux, presque méditatif, fait partie de la bande sonore du film « Enrico IV » de Marco Bellocchio, sorti en 1984.
Le tempo s’est accéléré avec les « Danses folkloriques roumaines » de Béla Bartók qui datent de 1915. L’orchestration a conservé l’esprit rural et populaire de cette musique tout en y apportant des couleurs instrumentales riches et nuancées.
La suite du programme a exploré des horizons encore plus variés, notamment avec un extrait de la bande originale du film « Cinema Paradiso » sorti en 1988. Composée par Ennio Morricone, cette musique a apporté une touche de lyrisme cinématographique à la soirée.
Trois musiciens de renom ont rejoint l’ensemble sous les applaudissements : Hatem Hamila aux percussions, Ahmed Litaiem au naï et Ghalia Ben Halima au luth. Avec eux, les sonorités orientales ont pris le relais, suscitant un vif enthousiasme du public.
Le jeune Ahmed Litaiem a déjà collaboré à des projets musicaux qui ont eu un énorme succès comme « 24 Parfums » de Mohamed Ali Kammoun. Il a également donné une série de concerts avec son propre projet « Rebirth quartet ». Pour ce concert, il a livré un solo raffiné au naï, mettant en valeur la richesse expressive de cet instrument emblématique des musiques orientales.
Mohamed Hatem Hamila est célèbre pour sa maîtrise de nombreux instruments de percussion d’origines différentes. Il a accompagné de grands artistes internationaux sur de grandes scènes en Tunisie et ailleurs. Parmi ses collaborations les plus notables, des spectacles avec le maître du qanoun Aytaç Doğan. Quant à Ghalia Ben Halima, c’est une jeune prodige de 17 ans, très remarquée ces derniers temps pour son talent prometteur.
Les musiciens ont enchaîné avec deux pièces du compositeur azerbaïdjanais, Adil Geray, qui ont été particulièrement applaudies pour leur richesse expressive. Il s’agit de « Shahnaz Sayaghi » puis « Bağçakürd » qui a offert une clôture dynamique au concert.
Le violoniste et compositeur italien Vittorio Monti s’est invité entre les deux œuvres avec «Czardas», une pièce qui remonte à 1904 inspirée de la danse folklorique hongroise qui porte le même nom. Cette musique se distingue par ses contrastes de tempo entre douceur et intensité.
Au final, il est clair que l’un des points forts de ce concert réside dans la diversité des répertoires abordés qui ont couvert un large éventail allant du XVIIIe au XXe siècle, tout en mettant en valeur des traditions musicales de divers pays. Le programme audacieux s’est volontairement écarté des classiques trop familiers pour laisser place à des œuvres moins explorées mais bien accueillies par le public manifestement réceptif à la nouveauté.
On aurait donc voulu trouver des flyers ou des programmes imprimés pour suivre le contenu, comme c’est habituellement le cas lors des concerts de musique symphonique, même si « La Cameratte » ne s’inscrit pas tout à fait dans le format symphonique traditionnel. Le maestro Shady Garfi a fait preuve d’une grande maîtrise technique durant sa prestation, mais son interaction avec le public est restée assez distante. Aucun mot d’accueil ni présentation des morceaux ni même des musiciens qui sont entrés séparément et non avec l’ensemble.
Après ce concert d’ouverture multiculturel, la Cité de la culture de Tunis s’apprête à héberger des événements musicaux de haut niveau. Le prochain annoncé est « La Traviata », une reprise tunisienne du célèbre opéra de Verdi avec à l’affiche deux grands noms de la musique lyrique : Hassen Doss et Lilia Ben Chikha. Le rendez-vous est fixé au 31 octobre prochain. Nous y reviendrons.