
Sous le slogan, «Un geste, un dépistage, une vie», l’Atamcs a réussi à mobiliser 300 femmes aujourd’hui à l’IFT qui ont pris conscience de l’importance d’un diagnostic précoce, pour une meilleure prévention et de meilleures chances de guérison, selon la trésorière de l’Atamcs. «Si le mal est diagnostiqué tôt, la chance de guérison s’approche même des 90 %», a clamé ainsi Mme Abir Ben Jannet. Pour peu que le processus soit suivi à la lettre…
La Presse — On a demandé au Dr Khaled Rahal, chirurgien cancérologue et président de l’Atamcs, d’évaluer la teneur de la mobilisation des femmes tunisiennes venues de toutes les régions pour dépister le cancer du sein et la raison de leur mobilisation sur place. Dr Rahal a dressé le bilan de la journée d’action volontaire qui s’est déroulée hier à l’IFT, la nécessité d’une prévention précoce, avant de présenter les derniers développements de la maladie en Tunisie. Il a livré ses impressions : «La mobilisation est très importante. Il y a un afflux important de femmes dès les premières heures de la manifestation, ce qui dénote l’intérêt que donne la femme tunisienne à sa santé et notamment dans le domaine de la prévention du cancer du sein. Donc depuis plusieurs années, nous travaillons sur le thème de la prévention du cancer du sein parce que c’est par là qu’on va préserver la santé de la femme tunisienne puisqu’on sait qu’en matière de cancer, plus le diagnostic est précoces plus les taux de guérison augmententent. Donc il faut travailler beaucoup sur cette prévention qui consiste à faire le dépistage du cancer du sein qui va reposer essentiellement sur trois bases. La première, c’est la pratique de la mammographie. Surtout toute femme à l’âge de 50 ans doit faire cet examen et elle le refait de façon périodique tous les deux ans. Le deuxième volet de cette prévention, c’est l’auto-examen, l’apprentissage de l’auto-examen du sein une fois par mois qui permet de bien connaître le sein et dès qu’il y a une anomalie qui apparaît, on va diagnostiquer la maladie. Le troisième volet, c’est l’examen clinique. À l’occasion de toute consultation, pour une raison quelconque, on se fait examiner le sein par notre médecin traitant. En réalisant ces trois volets, on aura assuré une bonne partie du diagnostic précoce et du dépistage du cancer du sein».
Augmentation des cas
On lui a demandé si le nombre de malades du cancer du sein, essentiellement des femmes, même si ça peut toucher les hommes très minoritairement, est en augmentation par rapport aux années précédentes. Chose à laquelle il a rétorqué sans ambages : « Absolument, malheureusement, les nouveaux cas de cancer augmentent d’année en année. C’est un phénomène mondial, ça se passe pour tous les pays et la Tunisie en est concernée. Actuellement, on tourne autour de, on va dire, 4000-4500 nouveaux cas de cancer du sein en Tunisie et on attend, selon des prévisions, en 2030, on atteindra les 6000 nouveaux cas. Donc l’augmentation est là et elle est certaine». Dr Rahal est brièvement revenu sur les facteurs de risque liés au cancer du sein. «C’est multifactoriel en fait. Essentiellement, c’est le facteur d’abord de l’âge. On sait que plus on avance dans l’âge et plus on est exposé à la maladie. Après, il y a le volet terrain familial et personnel. Quand on a une famille où il y a des cancers en général, on est plus exposé à la maladie. Et en particulier, si on a des cancers du sein dans la famille, le risque est encore plus élevé. Après, il y a les formes héréditaires, 5 à 10 % des cancers du sein. L’autre volet, c’est le volet qui a trait à l’environnement où nous vivons, où on sait que, par exemple, la consommation de tabac, la consommation d’alcool, la consommation excessive de graisse d’origine animale, l’obésité, sont autant de facteurs qui exposent au cancer du sein. De cet angle-là, on peut conseiller aux femmes d’éviter de fumer, d’éviter la consommation d’alcool, de lutter contre l’obésité, d’avoir une alimentation saine qui repose essentiellement sur tout ce qui est légumes, fruits frais, et un autre élément important qui est l’activité physique. Cette activité physique peut diminuer le risque de cancer jusqu’à 30-40 %. Quand on a une activité physique régulière, que ce soit de la marche ou autre, ou une activité sportive organisée, ça a des retombées très importantes pour notre santé».
Le cancer du sein est une tumeur maligne qui affecte le tissu mammaire et apparaît généralement dans les canaux galactophores et les glandes mammaires. Une cellule normale se transforme en cellule cancéreuse, se divisant et se multipliant rapidement de manière aléatoire, formant une masse pouvant atteindre 1 cm en huit ans. Le cancer du sein est le premier cancer touchant les femmes dans le monde et, en Tunisie, le nombre de nouveaux cas est en constante augmentation. Le nombre de nouveaux cas enregistrés en 2022 a atteint environ 3.500. Les hommes sont également à risque de développer un cancer du sein, représentant 1 % de tous les cancers. L’Atamcs, pionnière en Tunisie est sur tous les fronts multipliant les actions et les activités durant «l’octobre rose».
Une tradition avec l’IFT
Dans ce contexte, la trésorière de l’Association tunisienne d’assistance aux malades du cancer du sein, Mme Abir Ben Jannet EP Essai, est revenue sur le parcours de l’Atamcs, ses partenaires et ses objectifs. «L’Atamcs est une association qui a été créée depuis 2005 et qui est vouée à l’assistance des malades déjà atteints et la sensibilisation de toutes les femmes sur l’importance du diagnostic précoce du cancer. .
C’est l’objectif central de l’association. Cette journée de sensibilisation est en même temps celle du dépistage du cancer du sein. Au fait, avec l’Institut français, ça fait 5 ans qu’on est dans ce rituel et les femmes viennent pratiquement annuellement se faire diagnostiquer et c’est devenu une tradition chez elles. C’est un acquis précieux pour l’association parce que, je vous le dis, dans les années 2005-2006, au démarrage de l’association, on ne pouvait pas avoir plus d’une cinquantaine de femmes. Toutes les femmes ne voulaient pas se faire dépister parce qu’elles étaient dans le déni, la peur. Vous voyez, aujourd’hui le nombre de femmes qui se sont mobilisées. C’est un nombre très très important. Là, d’après ce que je vois, on va dépasser même les 300 ou 400 femmes. Ça va durer jusqu’à 4 heures de l’après-midi. Et donc, c’est un acquis précieux pour l’association que la femme soit consciente de l’importance du dépistage précoce.
Et je vous assure que depuis qu’on a commencé ces journées de dépistage, on a sauvé pas mal de vies. Pas mal de femmes sont venues et n’étaient pas au courant qu’elles avaient un problème. Et, Alhamdoulilah, on les a assistées jusqu’à ce qu’il y ait eu, que ce soit la chirurgie ou le traitement qu’il faut pour les femmes qui étaient atteintes du cancer du sein. Alors, notre deuxième rendez-vous, le prochain rendez-vous, ce sera le 26 octobre au centre culturel. Et c’est toujours une tradition pour nous. Le centre culturel aussi est notre partenaire. Donc, voilà. Comme vous voyez, on essaie d’être un peu proche des femmes. On a choisi l’Institut français. C’est un peu le centre-ville. Donc, on essaie de drainer toutes les femmes. Il y a tous les moyens de transport. Elles peuvent venir. Et le centre culturel, c’est la tradition de l’association. Ça fait des années qu’on organise ces journées de dépistage, de sensibilisation. Le dépistage est 100% gratuit. La mammographie pour les femme qui n’ont pas de couverture sociale. D’accord. Pour tous les âges de femmes, on a vraiment une tranche maintenant. Les femmes, on a toutes les tranches, celles qui viennent, même des jeunes filles qui veulent se faire dépister, on les dépiste. Mais bon, il est préconisé pour les femmes qui ont des cas dans la famille, c’est-à-dire une tante, la maman, la sœur. Faire une mammographie à partir de l’âge de 35 ans est primordial. Bref, l’autopalpation. Dans les journées qu’on fait, on enseigne aux femmes comment s’auto palper une fois par mois après le cycle menstruel. S’autopalper à la recherche d’une malformation, une boule. La mammographie est impérative à partir de l’âge de 35 ans pour les femmes qui ont des cas proches, la sœur, la tante, la maman. Sinon, à partir de 50 ans pour les femmes qui n’ont pas de proches ou d’antécédents familiaux. C’est un rituel qui s’installe dans leur mentalité. Chaque année, on fait et on parle de ça. Je vois que la mentalité a beaucoup changé».
Caravanes de santé dans les régions
De son côté, Mme Mejda Falfoul, responsable de l’organisation des caravanes sanitaires à l’Atamcs a donné un autre son de cloche au sujet des caravanes qui ne se focalisent pas sur le seul mois d’octobre de chaque année : « En octobre, nous ne partons généralement pas loin. On essaie de rester proches des choses sur place, des organisations avec lesquelles nous travaillons à l’instar du Croissant-Rouge à l’Ariana. Ceci dit nous sommes allés à Nabeul, nous avons fait de la sensibilisation sur le marché, avec la société Autorad, nous avons travaillé à Monastir, nous faisons quelques actions. Au milieu de l’année, nous sommes allés dans le sud, à Gabès, à Jendouba, à Tataouine, toute la république. On a suivi une carte des régions à parcourir, nous sommes même allés à la campagne, nous travaillons beaucoup avec les associations actives dans la société civile, après quoi, nous soutenons l’école dans les centres de jeunesse, chaque école a des demandes ou nous organisons des actions pour elles, nous marchons et déplaçons le matériel médical, nous marchons et déplaçons les médicaments et les sages-femmes et marchons et faisons de la sensibilisation et nous travaillons dans les cliniques, où nous faisons de la sensibilisation en général».
L’Atamcs en bref
L’Association tunisienne d’assistance aux malades du cancer du sein a été fondée en 2005. C’est une association caritative d’aide d’urgence dont les objectifs sont les suivants : accompagner les patientes pendant leur traitement ; les aider à surmonter la phase de découverte de la maladie et ses difficultés ; les aider à surmonter les complications liées aux différentes étapes du traitement, notamment la chirurgie, la chimiothérapie et la radiothérapie, afin de retrouver une apparence normale ; les aider à constituer un dossier médical pour la prise en charge de leur traitement par la Caisse nationale d’assurance maladie ; les aider à se réinsérer dans leur famille, leur travail et la société ; sensibiliser à l’importance du diagnostic et du dépistage précoces, et à leur impact à toutes les étapes du traitement ; réduire le fardeau des coûts de traitement pour les familles et l’État. Parmi les mécanismes adoptés par l’Association, il y a la nécessité d’apporter un soutien matériel et moral aux patientes atteintes du cancer du sein en communiquant avec elles par téléphone et sur les réseaux sociaux. Accueillir les patientes au siège de l’association et mettre à leur disposition une équipe de bénévoles expérimentés pour les encadrer, les guider, répondre à toutes leurs questions et leur apporter des solutions adaptées. Organiser des réunions périodiques avec une équipe de médecins spécialisés dans le cancer du sein et les spécialités connexes (psychologie nutritionnelle et esthétique). Organiser également des activités culturelles et récréatives (ateliers de dessin et de musique, journées sportives), des journées portes ouvertes pour la sensibilisation, le diagnostic précoce et le dépistage, des forums et des caravanes de santé et de sensibilisation.