De Paris, Saliha Fayez – Abdallah Zekri, président de l’Observatoire de lutte contre l’islamophobie, a dénoncé avec une rare virulence l’acte de vandalisme survenu dimanche 30 novembre à la mosquée du Puy-en-Velay, en France. Pour lui, cette profanation n’est pas un incident isolé, mais le résultat direct d’un climat «volontairement alimenté» par certains discours politiques et médiatiques.
«C’est un acte de haine d’une lâcheté absolue», s’indigne-t-il. «Mais il faut arrêter de faire semblant : quand, jour après jour, des médias présentent les musulmans comme un problème et quand des responsables politiques multiplient les déclarations hostiles, il ne faut pas s’étonner que certains passent à l’acte. On sème la suspicion, on récolte la violence», a-t-il déploré, dans une déclaration à Algeriepatriotique.
Abdallah Zekri accuse une partie du débat public d’entretenir un terreau propice à la montée des actes antimusulmans. «Les agressions, les menaces, les profanations se multiplient. Elles explosent même : +169%, et encore, ce chiffre est certainement en dessous de la réalité. Et que voit-on en face ? Un silence assourdissant. Aucune prise de position ferme, aucune limite fixée à ceux qui attisent les tensions. Cela devient intenable», a-t-il regretté.
Le recteur de la mosquée de la Paix, à Nîmes, se montre particulièrement offensif envers certains responsables politiques : «A l’approche des élections, certains n’hésitent plus à utiliser les musulmans comme variable électorale. Quand on propose d’interdire le voile dans tout l’espace public, quand on prétend vouloir encadrer voire empêcher le Ramadhan chez les jeunes, on franchit une ligne rouge. Ce sont des attaques directes contre la liberté religieuse. C’est une ingérence grave dans un culte qui n’a jamais demandé autre chose que la paix et le respect mutuel.»
Abdallah Zekri estime qu’à ce stade, «il est irresponsable de feindre la surprise». «Si on ne met pas un coup d’arrêt à ces discours radicalisants, les actes comme celui du Puy vont se multiplier. Les musulmans de France ne doivent plus être les boucs émissaires d’ambitions politiques», avertit-il, agacé par l’immobilisme du gouvernement.
«Cette attaque intervient alors que la communauté musulmane dénonce un durcissement significatif du climat public. La profanation survient quelques jours après la publication d’un sondage de l’IFOP, profondément stigmatisant, ainsi qu’après la diffusion d’un rapport signé par une trentaine de sénateurs LR proposant des mesures considérées comme une intrusion inacceptable dans les pratiques religieuses musulmanes, au point de vouloir imposer des règles contraires aux préceptes du culte», rappelle Abdallah Zekri. «A cela s’ajoute cette révélation médiatique sur une enquête commandée par le Crif portant sur la communauté musulmane, en flagrante violation du cadre légal français», poursuit-il. Pour lui, «l’accumulation de ces signaux contribue clairement à l’installation d’un climat de défiance et de crispation».
Dimanche après-midi, un individu a pénétré dans la mosquée du Puy-en-Velay, renversant les livres de prière, déchirant et aspergeant des exemplaires du Coran avant de les jeter au sol. Les micros ont également été détruits. Dans le lieu de culte, c’est l’abattement : «On ne sait pas jusqu’où cela peut aller. Des enfants étaient dans une autre salle à ce moment-là. C’est extrêmement inquiétant», confie un responsable.
S. F.