Par Nabil D. – L’adoption de la résolution 2797 du Conseil de sécurité de l’ONU sur le Sahara Occidental a donné lieu à une bataille de communication aussi intense que la bataille diplomatique qui l’a précédée. D’un côté, certains milieux médiatiques proches du Makhzen se sont empressés de la présenter comme une «victoire décisive du Maroc» et la «consécration» de son plan d’autonomie. De l’autre, une lecture rigoureuse du texte révèle une réalité bien différente. «Loin d’un triomphe, il s’agit d’un texte d’équilibre, arraché mot à mot, où la diplomatie algérienne a réussi à préserver l’essentiel, c’est-à-dire le principe du droit à l’autodétermination du peuple sahraoui», explique une source diplomatique algérienne proche du dossier, sollicitée par Algeriepatriotique.
«Entre le projet initial (zero draft) et la version adoptée, la différence est considérable. Le texte de départ, fortement influencé par certains appuis du Maroc – notamment la France et les Emirats arabes unis – penchait nettement vers une reconnaissance implicite du plan d’autonomie marocain. Or, grâce à une mobilisation diplomatique intense, l’Algérie et ses alliés ont réussi à ramener la résolution à une formulation équilibrée, où la neutralité du Conseil est préservée», précise notre source. «C’est là une victoire silencieuse, mais stratégique», souligne-t-elle.
«Les commentateurs qui prétendent que la résolution entérinerait le plan marocain omettent un fait essentiel. Ce plan est évoqué par le Conseil de sécurité depuis 2007. Rien de nouveau, donc. Faire croire le contraire relève de la propagande plus que de l’analyse. La résolution ne valide aucune solution, elle se contente d’en rappeler l’existence, au même titre que le droit à l’autodétermination», poursuit notre source.
La lecture attentive du texte révèle un usage massif du conditionnel, «pourrait», «serait», «devrait». «Or, en diplomatie, ce n’est jamais innocent», fait remarquer notre source, selon laquelle «ce langage prudent traduit le refus du Conseil de sécurité d’imposer quoi que ce soit». «Il montre que la communauté internationale n’entend pas cautionner une solution unilatérale, quelle qu’elle soit», étaye-t-elle.
Par ailleurs, l’emploi répété de l’expression «peuple du Sahara Occidental» est une victoire symbolique majeure. «A l’heure où certains cherchent à effacer cette identité en parlant d’un Sahara marocain, le texte onusien rappelle la réalité juridique du conflit, à savoir qu’il s’agit bien d’un peuple, reconnu comme tel, en attente d’un processus d’autodétermination», relève encore notre source, qui note que la formule «mutuellement acceptable» revient comme un mantra. «Ce n’est pas un hasard. Elle traduit le refus de toute solution imposée par la force ou la domination. Le Conseil de sécurité réaffirme que seule la négociation, menée dans un esprit de compromis, peut ouvrir la voie à une paix juste et durable», indique notre source.
Enfin, un constat que même les responsables marocains admettent : sans l’Algérie, aucune issue n’est possible. «Le texte le sous-entend, les chancelleries le savent, et Rabat le reconnaît à demi-mot. L’Algérie n’est pas un simple voisin concerné, mais un acteur central, porteur d’une vision fondée sur la légalité internationale», fait savoir notre source diplomatique, pour laquelle la résolution 2797 «est, en définitive, un rappel à l’ordre diplomatique : le dossier du Sahara Occidental reste une question de décolonisation inachevée, et tant que le peuple sahraoui n’aura pas pu exercer son droit à l’autodétermination, aucune manœuvre de communication ne pourra travestir la réalité du droit».
N. D.