Cameroun : Le silence de Paris, signe d’une rupture diplomatique après la réélection contestée de Pa :: CAMEROON
Cinq jours après la proclamation des résultats de l’élection présidentielle camerounaise du 12 octobre 2025, qui a reconduit frauduleusement Paul Biya pour un nouveau mandat avec 53,66% des suffrages selon le Conseil constitutionnel, la réaction de la France rompt avec la tradition. Habituellement prompte à adresser des félicitations, l’ancienne puissance coloniale a, cette fois, opté pour une prudence diplomatique marquée, se contentant d’exprimer sa “vive préoccupation” face aux tensions post-électorales. Cette retenue inédite interroge et signale potentiellement un tournant majeur dans les relations entre Yaoundé et Paris, un axe historique de la politique africaine française.
Le ministère français des Affaires étrangères a en effet publié des déclarations les 29 et 30 octobre, insistant sur une “attention toute particulière” portée à la situation et déplorant des violences qui auraient fait au moins douze morts lors des manifestations. Au lieu des vœux protocolaires, Paris a appelé de manière ferme à la retenue de toutes les parties, à la protection des populations civiles et à la libération immédiate des manifestants arbitrairement détenus.
Cette position, bien que conforme aux valeurs démocratiques prônées, tranche radicalement avec les précédentes consultations, où les félicitations étaient la norme malgré des contestations récurrentes. L’absence de congratulations officielles jusqu’à ce jour, le 1er novembre, est un indicateur fort d’un malaise au sommet, remettant en question le “partenariat historique” longtemps vanté.
Ce changement de tonalité est d’autant plus significatif que le Cameroun est un allié stratégique de longue date en Afrique centrale. Les observateurs s’accordent à dire que cette diplomatie de la préoccupation est un signal envoyé aux autorités camerounaises. Elle reflète également la pression croissante de l’opinion publique et des acteurs internationaux qui, à l’instar de l’Union européenne et de l’ONU, ont également exprimé des réserves quant au déroulement du scrutin. Sur les réseaux sociaux, notamment, la réaction française est analysée avec un scepticisme mesuré, beaucoup d’internautes y voyant une manœuvre stratégique plutôt qu’un engagement sincère en faveur de la démocratie. La France, par son silence, tente de naviguer entre la nécessité de maintenir une influence régionale et l’impératif de respecter les droits humains et la démocratie.
Alors que l’ambassade française à Yaoundé et le consulat à Douala restent en alerte maximale face à la persistance des manifestations et des arrestations dans les grandes villes, tous les regards sont désormais tournés vers la date d’investiture. Le calendrier de la cérémonie d’assermentation de Paul Biya, traditionnellement prévue début novembre, est désormais un facteur clé.
La France pourrait choisir d’attendre l’investiture formelle avant de faire tout geste diplomatique définitif. En attendant, ce statu quo sème le doute sur l’avenir des relations franco-camerounaises et confirme que les dynamiques de pouvoir en politique africaine sont plus que jamais en mutation.
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